Saison : 2015-2016
Neverland
Neverland est une rêverie, une traversée fantasmatique sur la figure mythique de Michael Jackson.
David Léon traverse ici des thèmes qui lui sont chers, l’éducation, la violence sourde faite aux enfants, l’exclusion, la différence. Peuplée de « sosies », la pièce questionne les troubles de l’identité. Elle met en scène deux jeunes adolescents, Jimmy et Mikaël et donne la voix à une figure qui analyse et décortique qui fut Mikaël. Construite comme un kaléidoscope le texte se noue dans le tragique et l’onirisme touchant la dimension d’une cérémonie incantatoire, d’un requiem profane et funk.
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Neverland, c’est l’entrelacement d’une malédiction personnelle, celle de Michael Jackson et d’une malédiction collective, cette du peuple noir transmise d’une génération à l’autre et le combat, en soi, pour y échapper.
Mikaël a été humilié, maltraité par un père écrasé par le poids de sa mélanine et conscient en même temps que la couleur la peau du Noir en fait l’élu de Dieu en même temps que la malédiction du Blanc. Abusé, Mikaël ne peut pas grandir comme être humain, il reste un enfant et « reproduit » l’abus, mais transcende sa blessure dans la danse. Là, il est divin et donne corps à la parole paternelle. Ce génie-là dépasse l’explication psychologique, scientifique.
Le regard blanc sur le Noir objective et réduit. Le Noir en arrive à se détester et s’autodétruire. Les commentaires de la psychologue relèvent de ce point de vue objectif et réducteur.
Le personnage Mikaël me fait penser à Thomas Bernhard que j’ai monté. Dans un tout autre registre, Bernhard a été un artiste à l’enfance ravagée par un père absent et la détestation maternelle. Il ne s’est jamais réalisé comme homme, mais il fut cet écrivain qui éructa comme personne sa puissance créative, qui écrivait pour vivre, écrivait comme on respire, pour survivre à sa condition d’Autrichien qu’il détestait par-dessus-tout, mais qu’il n’aurait jamais pu abandonner.
Blandine Savetier
Les 5 pièces – portrait d’Aurélien Feng
Texte à paraître aux Editions Espaces 34 en 2017
par Blandine Savetier
assistante Irina Solano
avec Océane Cairaty, Cyril Gueï, Aurélien Feng, Josué Ndofusu, Irina Solano, Souleymane Sylla
Le chiffre de son domaine
Le chiffre de son domaine est la première partie d’un diptyque intitulé QS DRONED ME consacré aux questions de la surveillance des corps, des frontières et des identités en ce début de XXIe siècle. Entre réel et virtuel, le texte met en scène d’un côté une entité aux contours mouvants disant « je », se décrivant par chiffres et codes et de l’autre un duo de frères pilotes de drones confinés dans un garage sans fenêtres, occupés à la tâche épuisante de ne rien faire, ou presque…
Dans Le chiffre de son domaine Un homme/Une femme s’avance et commence à dresser le portrait de son « Quantified Self » , présentant sa vie sous forme de données, de chiffres.
Poème du lyrisme mathématique, monologue chiffré à l’heure de l’auto surveillance, autoportrait vertigineux de la statistique intime, analyse pointilliste de la performance personnelle, cette ballade dans le « Quantifie Self » permet d’entrevoir une nouvelle définition de l’humanité, où tout se traduit à la fin par des 0 et des 1 alignés, hiéroglyphes contemporains sur une pierre de rosette du XXIème siècle.
Production Compagnie la multinationale
par François-Xavier Rouyer
avec Pauline Belle
C’est la vie
Après Finir en beauté, spectacle autobiographique sur la mort de sa mère qu’il a présenté à Théâtre Ouvert en juin dernier, Mohamed El Khatib prépare une nouvelle pièce sur la question du deuil, toujours à partir de témoignages et matériaux réels. Théâtre Ouvert l’accueille en résidence pour l’exploration dramaturgique de ce texte en cours, porté par deux acteurs, Fanny Catel et Daniel Kenigsberg, qui ont l’un comme l’autre vécu la perte d’un enfant.
Dans la littérature dramatique, la tragédie de la perte d’un enfant est sans cesse rejouée. Véritable motif historique, on n’a pourtant jamais réussi à nommer les parents qui ont perdu un enfant.
Ces orphelins à l’envers qui héritent de leurs enfants sont les oubliés de la sémantique. Seul l’hébreu et l’arabe ont tenté de réparer cette injustice avec le terme Shakoul (littéralement l’ourse à qui on a pris ses petits) et Takal (dont on a coupé les bourgeons).
Nous allons tenter avec cette recherche esthétique, portée par ces deux acteurs, de contribuer à combler le vide terminologique et poser un premier drapeau sur ce territoire abandonné par la langue.
Mohamed El Khatib
Production Zirlib, Théâtre Ouvert, CDN Orléans Loiret Centre, T2G-Centre Dramatique National de Création Contemporaine, Bois de l’Aune – Aix-en-Provence, le Théâtre Liberté -Toulon
Avec le soutien de la Région Ile-de-France
texte et conception Mohamed El Khatib
collaboration artistique Fred Hocké
avec Fanny Catel, Daniel Kenigsberg
La vie n’est pas une chose facile
Dans cette pièce nouvellement traduite, Georgia Mavraganis, jeune auteure grecque, donne la parole à un chœur d’adolescents.Ils disent la vérité et se moquent de ce que l’on appelle habituellement l’âge mûr.
C’est très drôle, incisif, mais les lettres qu’ils adressent à leurs parents et amis sont aussi très touchantes.
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La vie n’est pas une chose facile de l’auteure grecque Georgia Mavraganis parle d’un âge que nous avons tous vécu. L’adolescence. Avec ses colères, ses mystères et ses questions. Nous avons tous eu le désir d’un monde meilleur et nous avons luté avec nos limites. Dans ce texte, on parle de la famille. On parle d’angoisse. De la peur. De l’autre. Des mots se déversent. Des questions se posent. De qui et quoi héritons-nous, depuis notre naissance ? Qui sommes-nous ? D’où vient-on ? Vers ou va-t-on ? Porté par un chœur de jeunes gens, ce texte est un témoignage d’une génération actuelle. Une génération qui cherche son futur. Qui se construit sur une histoire chargée. Comment garder son innocence, sa candeur dans un monde qui semble nous pousser vite à devenir des « grands » ? Plus le temps de la réflexion, plus le temps du partage. Et ça s’accélère. Et ça s’accumule. Nous sommes des machines connectées en permanence à un réseau. A partir de là, la solitude s’installe, l’enfermement grandit et l’illusion de la communication n’est qu’un écho à ce manque de réel. On devient vite des adultes. On commence vite à donner des ordres. On commence à décider pour les autres. On vieillit dans nos esprits et on se construit en fonction de la norme.
Eugen Jebeleanu
Dans le cadre de Paroles d’Europe, cycle de lecture de Chantiers d’Europe
Production Théâtre de la Ville
En partenariat avec le Centre Hellénique
traduit du grec par Christine Avgeris
par Eugen Jebeleanu
avec des élèves du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique
Marilou Aussilloux, Camille Constantin, Aurélien Feng, Etienne Galharague, Amandine Gay, Lucile Jegou, Malek Lamraoui, Emma Meunier, Charlaine Nezan, Mathieu Perotto
Communiqué
« Vous devriez débarrasser un peu vos ateliers, on n’y voit plus clair. Comment pouvez-vous travailler au milieu de ces détritus, de ces vieux châssis, le technicien va venir la semaine prochaine et tout mettre à la benne si vous ne venez pas vous-même retirer vos affaires. Mais c’est une étude sur le pourrissement, l’accumulation. Ça se fait dans le temps. Ne pas toucher aux fruits qui se décomposent merci, travail en cours !! »
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Un artiste, aujourd’hui, doit savoir parler de son travail. Raconter de quoi il s’agit et résumer en quelques mots les enjeux principaux. Il faut savoir expliquer ce qu’on fait. Comment composer un discours qui ait du sens ? Peut-on s’approprier les interprétations des autres afin de comprendre soi-même ce qu’on essaye de dire ? Je m’interroge sur le moment de mes études à l’école d’art. Je questionne mon rapport à la parole. En partant du contexte familial, je reviens sur l’apprentissage et les premiers balbutiements. Je me souviens des rendez-vous avec les enseignants, de la difficulté à nommer un sujet, des anges qui passaient tranquillement dans les ateliers aux murs blancs. Je cite quelques phrases recopiées de communiqués de presse. Je coupe, je classe, je colle.
Valérie Mréjen
Ce texte a été présenté sous forme de Conférence-performance par Valérie Mréjen au Théâtre du Rond-Point en 2015
par et avec Valérie Mréjen et Arthur Nauzyciel
LAYLA, à présent, je suis au fond du monde
Partir. Un matin, prendre la route. Elle n’a pas vingt ans, elle sort de chez elle. Elle ne dit rien à ses parents. Au hasard, elle prend un train. Ce n’est pas une fuite. Un départ peut-être, mais sans but. Les médecins parleront plus tard de voyage pathologique, poseront des diagnostics, proposeront des traitements. Elle, elle dira simplement que pour la première fois, elle se savait vivante. Écrire cette traversée, cet affrontement au monde embrassé entièrement et cette plongée dans la ville hostile et en soi-même, c’est retrouver la voix qui nous a été confiée, et c’est vouloir la libérer de nouveau.
Il y a huit ans déjà, Layla nous a confié son histoire, qui n’est pas notre histoire mais qui est l’histoire de notre monde et de notre possibilité de l’habiter. C’est pourquoi nous l’écrivons ensemble. Metteur en scène et dramaturge. Nous l’écrivons avec cette voix déposée en nous comme un secret, ou comme un pacte. Celui qui lie la vie à l’insulte qu’on adresse au monde pour devenir vivant. Nous l’écrivons avec les folies qui nous peuplent. Avec la puissance de tous les départs. Avec ceux qui sont allés jusqu’au fond du monde, dans Aden comme auprès des Tarahumaras, pour trouver de quoi en finir avec l’identité pauvrement originelle ; ceux qui ont cherché à se donner naissance en se brûlant au feu du réel qui nous consume.
Car le feu que l’on allume en soi nous vient toujours du dehors.
Arnaud Maïsetti, Jérémie Scheidler
Production compagnie La Controverse
avec le soutien du CCAM-Scène Nationale de Vandœuvre-lès-Nancy, du Théâtre de Vanves, du Théâtre-Studio d’Alfortville – Studio des Arts Numériques, du Vivat-Armentières, du Relais – Centre de recherches théâtrales
Ce projet s’inscrit dans le cadre d’un compagnonnage (dispositif de la DGCA) entre Jérémie Scheidler et Dieudonné Niangouna
par Jérémie Scheidler
avec Boutaïna El Fekkak
« Mon mari, j’l’ai rencontré au Podium numéro 1, place de la République et c’était Dave qui était venu chanter. J’l’ai rencontré là au Podium numéro 1, place de la République, c’est vieux. Août 76. Un tour de moto et puis ça y est c’était bon. J’suis une grande fan de moto moi, et j’avais un ami y m’dit viens j’te présente mon pote et tout… ouais… puis voilà, un r’gard, tour de moto, pis voilà…
J’ai un coup de foudre. Donc, on se met en ménage. Je prends un appartement à mon nom. 18 ans j’ai ma fille. 21 ans j’ai mon gamin. 22 ans, j’ai mon deuxième gamin (rire) j’ai mes trois enfants à 22 ans et puis voilà. Après tu connais ton mari, tu t’dis ça y est bon ben ça va être la belle vie. Tu dis voilà la vie normale. La vie… tu vois l’truc super bien… blablabla et puis c’est pas ça du tout. Tu te rends compte que c’est pas ça. Et tu t’en rends compte quand il est trop tard que t’as trois enfants.
C’est avant qu’j’aurais dû m’en rendre compte. Et pas après… »
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Dans Hôtel Métamorphoses, on croise acteurs amateurs et professionnels qui chacun à leur manière répètent ou représentent une métamorphose d’Ovide.
Nous sommes d’abord à l’école de la Miséricorde où M. Gaillard a mis en scène des enfants dans une adaptation de Narcisse. On commente la représentation, une mère d’élève parle mythologie avec M. Gaillard, la conversation s’envenime…
Un détenu s’adresse à un mannequin qu’il a lui-même fabriqué, c’est une femme au réalisme troublant. Sous ses baisers le mannequin s’anime devant nos yeux, c’est Pygmalion.
Dans un lycée, M. Gaillard, encadre un atelier théâtre. Malgré lui, il se retrouve à jouer le rôle de Cinyras dont la fille Myrrha est amoureuse…
Ensuite, des acteurs professionnels débattent à propos du réalisme et de la vraisemblance. Peut-on jouer un prisonnier et comment ? Le metteur en scène propose alors d’improviser en faisant jouer aux acteurs le rôle de leurs propres père ou mère. L’une d’elle refuse, elle préfère interviewer la femme de ménage du théâtre. Elle apparaît alors sous les traits de cette femme. Son récit quasi documentaire fait place à la reconstitution de sa vie d’il y a 20 ans. Mais l’histoire est dynamitée et voici que Nicole, à travers son histoire même, devient Procné. Ici, le réel pourra prétendre à devenir fiction, quand de son côté, la fiction se donnera pour réelle. C’est cette dernière métamorphose que nous présenterons à Théâtre Ouvert.
Guillaume Vincent
Production Compagnie MidiMinuit, Théâtre Ouvert
avec le soutien de la Région Ile-de-France
dramaturgie Marion Stoufflet
scénographie François Gauthier-Lafaye, en collaboration avec James Brandily
lumière César Godefroy
musique Olivier Pasquet
son Géraldine Foucault
costumes Lucie Ben Bâta
avec Lucie Ben Bâta, Jean-Édouard Bodziak, Emilie Incerti Formentini, Florence Janas, Alexandre Michel
Angleterre, Angleterre
Dans Angleterre, Angleterre, la misère est exploitée par d’autres miséreux. Un passeur dans la jungle de Calais « rend service » et tire profit de la situation. La barque, le camion réfrigéré. Comment passer d’une jungle à l’autre ? Entasser des migrants entre deux mers. Concentrer des vivants dans des camps. Gazer les enfants aux frontières. Entre deux jungles : payer ou disparaître.
Faut-il hiérarchiser la misère ? Compter les embarcations de fortune ? Regarder passer. Une barque de ce côté-ci vaut-elle moins qu’un bateau de ce côté là ? Fuir la guerre et se rater en Méditerranée… Elle est où l’Europe ?
Et si le théâtre nous permettait d’ouvrir les yeux et d’assister au spectacle les yeux ouverts jusqu’au bout ? Et si le rire convoqué par Aiat Fayez nous aidait à passer à l’action ?
Texte à paraître chez L’Arche Editeur.
Aiat Fayez est représenté par L’Arche, agence théâtrale.
Production garçon pressé, Théâtre Ouvert
avec le soutien du JTN
avec Zohra Benali, Daniel Delabesse, Loïc Riewer, Mohamed Rouabhi
À l’OEil Nu, À voix haute
« Vous êtes peut-être nombreux à avoir déjà mis les pieds dans un sex-show, ou un peepshow, ou un live-show – mais même lorsqu’on les fréquente assidûment, ces lieux tendent à garder une pointe de mystère, quelque chose d’irrésolu, d’ambigu (qu’on l’aime ou le fuie).
N’est-ce pas ? Il s’agissait de notre lieu de travail – pendant plusieurs années pour certaines, quelques mois pour d’autres. (…) ».
Extrait de À l’OEil Nu (Éd. P.O.L)
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À l’OEil Nu, À voix haute est une lecture pour deux voix à l’unisson s’appuyant sur le livre d’Alice Roland, À l’OEil Nu, paru aux éditions P.O.L en octobre 2014. Ce livre est une fiction qui se présente comme un recueil de témoignages. Plusieurs strip-teaseuses y racontent à la première personne un pan de leur expérience dans le lieu où elles ont exercé cette activité, un sex-show nommé « À l’OEil Nu ».
Le mélange d’une voix masculine et d’une voix féminine fait écho au fonctionnement binaire et hétéronormé des sex-shows, que l’on retrouve dans un grand nombre de pratiques et codes sociaux bien au-delà du strip-tease. Les deux performers, malgré leurs différences patentes, font exercice de ressemblance et lisent ensemble les récits des strip-teaseuses, dans un même souffle, portés par un même flux mélodique. Ils bougent, aussi. Bref, c’est un travail comme un autre.
Gaspard Delanoë & Alice Roland
Production association Os
conception et interprétation Gaspard Delanoë, Alice Roland
Steve Jobs, corps aboli
Un bonimenteur californien connu meurt et le monde entier est en deuil.
On comprend le monde entier.
Mieux qu’une lotion capillaire ou une pilule pour bander toujours, l’entrepreneur vendait des surfaces merveilleuses pour se débarrasser d’autrui, cette plaie sur notre chemin.
C’était un puritain sans joie, un buveur d’eau, amateur de régimes stricts et de cilice mental, mais il avait une grande faim et le génie de sa faim. Il avait des colères fracassantes, des crises de larmes et un cancer du pancréas. Ses machines célibataires peuplent le monde mais il craint d’avoir raté sa sortie.
Il revient mourir et nous haranguer.
Alban Lefranc
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Toujours le lieu de recherche des formes de présentations à venir ressemble à un atelier d’artisans dans lequel les outils sont les vivants et les objets, les idées. Un établi sur lequel nous déposons nos envies de mélanger les écritures, les modes de jeu, les façons de faire.
Nous cherchons les vitesses de jeu, plutôt que des formes de représentation, les vitesses qui font que représenter n’est pas une fin en soi, qu’il faut s’y remettre, et refaire, à plusieurs, par exemple : un auteur, des acteurs, des chercheurs, des spectateurs, une durée.
Steve Jobs avec sa baraque foraine mondiale est la matière première de notre étalonnage.
Nous pensons à : sa vie, sa maladie, ses objets, sa pomme, ses drogues, son pull col roulé, ses surfaces lisses, ses fenêtres lumineuses, ses infinis, ses perspectives, ses peuples, ses longues marches avec le Pape sur la Muraille de Chine et ainsi de suite.
Robert Cantarella
Production Théâtre Ouvert, R&C
Avec le soutien de la Région Ile-de-France
par Robert Cantarella
assistante Clémentine Colpin
avec François Athané, Clémentine Colpin, Emmanuelle Coutellier, Frédéric Fisbach, Cécile Fišera, Pierre-Félix Gravière, Roger Itier, Mathieu Montanier